Community Management et Loi Evin : les marques de vin peuvent-elles aller sur Instagram ?

Depuis quelques mois, nous accompagnons avec le collectif de community managers freelance Zebrure un grand négociant de vins de Bordeaux, qui nous a aimablement confié l'animation de plusieurs marques de vin sur les réseaux sociaux : nous créons pour eux différents contenus destinés à Facebook essentiellement (photos et textes), et la question d’aller sur Instagram ou pas est en train de se poser...

Mais il y a toujours ce spectre de la loi Evin qui plane sur la publicité sur l’alcool et qui, même si elle a été assouplie en Juin 2015 , exige de faire attention lorsque l’on communique sur l'alcool. J’ai donc un peu investigué sur la question et vous propose dans cet article de faire un point de la situation en cette fin septembre 2015.

Alors rappelons d’abord ce que dit la loi Evin : celle-ci a posé en 1991 le principe général d’une interdiction de la publicité directe ou indirecte en faveur de l’alcool quel qu’il soit, sauf dans certains cas énumérés à l’article L3323-2 du code de la santé publique, qui autorise certains médias à diffuser des publicités sur le vin et l’alcool comme la presse écrite si elle n’est pas destinée à un public mineur, la radio dans certaines tranches horaires, les affiches et les enseignes, les catalogues et brochures envoyés par les professionnels…une liste complétée en 2009 (Loi Bachelot - Merci Roselyne) par… INTERNET, "sous réserve que la propagande ou la publicité ne soit ni intrusive, ni interstitielle."

Cette loi a été complétée par différents amendements et autres décisions de jurisprudence (le droit français est si simple), mais on peut globalement conclure aujourd'hui qu’il est autorisé pour une marque d’alcool de communiquer sur internet à condition que :

• Le message soit le plus objectif possible et limité à de l’information comme le degré d’alcool d'un produit, son origine, son nom, sa composition, son territoire de production, les distinctions obtenues, ses appellations d’origine, sa couleur, ses caractéristiques olfactives et gustatives, etc. Mais il ne faut pas associer l'alcool au plaisir, à un mode de vie attractif et festif ou en train d’être consommé (pas d'incitation à la consommation). Le message doit être sobre et associé à un environnement visuel neutre.

• Un bandeau "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé » soit aposé de manière lisible sur les photos.

• Protection des mineurs : sur un site de vente en ligne de vin, le visiteur doit certifier au moment d’entrer qu’il a bien 18 ans. Concernant Instagram, vous pouvez mettre simplement une mention dans la bio du compte de type "Vous devez avoir 18 ans pour suivre ce compte"  ou quelque chose comme ça.

Update du 23.10.2017 : Vous pouvez aussi désormais installer une "age-gate" sur votre compte instagram traitant d'alcool. 

Instagram est devenu l'un des réseaux sociaux les plus utilisés après Facebook. L’application a même dépassé Twitter en nombre d'utilisateurs actifs avec, à ce jour, 400 millions d'utilisateurs pour le réseau social de partage de photos contre 300 millions pour la plateforme aux gazouillis (source : Mashable).

L'utilisation d'Instagram est simple et ludique pour les consommateurs, qui n’ont besoin que d’un smartphone pour y être actifs, et ils s’en donnent à coeur joie dans tous les moments forts de leur quotidien - comme au moment d'un bon repas ou d’une rencontre conviviale entre amis… et qui dit repas ou rencontre conviviale entre amis dit souvent… VIN !

Or une recherche sur les hashtags #vin ou #wine montre à quel point le vin est un sujet de photo qu'il partagent avec plaisir sur ce réseau social. Et comme ils mettent alors souvent une marque de vin en particulier en avant, ce serait dommage pour cette marque de ne pas rebondir sur le post n’est-ce pas ?... ;-)

1. Je partage : comme pour tout réseau social, la parole des utilisateurs est reine. Aussi un partage (ou "regram") de ces photos de consommateurs lorsqu’elles concernent votre enseigne et qu’elles sont de qualité est tout à fait sensé à mon avis, mais assurez-vous avant de les republier sur votre compte d'y ajouter quand même le fameux bandeau "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé » et puis de donner quand même le nom de son auteur dans la description (droits d’auteur et politesse obligent - sans compter que c’est bon pour votre communauté de «taguer» les humains qui s’y cachent et ça vous excuse en plus si la photo n'est pas d'une qualité faramineuse et pharaonique).
2. Je raconte des histoires, je mets en scène sans pousser à la consommation et j'informe sur mes produits (story telling façon Loi Evin). Oui, raconter des histoires et faire rêver vos fans avec vos produits mis en avant dans de belles photos, accompagnées d’un texte inspirationnel et objectif et de quelques hashtags pour s’assurer d’être vu, c’est assurément la meilleure chose que vous avez à faire en tant que marque de vin. A quelle fréquence ? Je dirais pourquoi pas une photo chaque jour si vous avez suffisamment de matière, mais 3 fois par semaine, c’est déjà bien, sans compter les regram des photos d’utilisateurs s'il y en a.
3. Je développe mon audience. Dans l’univers du vin et de la nourriture en général, vous trouverez de nombreux « food bloggers » qui font de magnifiques photos de plats/recettes et accepteront peut-être d’établir un partenariat avec votre marque pour mettre vos bouteilles en avant (en toute objectivité bien sûr). Les influenceurs sont à mon avis la clé du développement de votre communauté, même si depuis peu, vous pouvez également faire de la publicité sur Instagram, à la façon de ce qui se fait sur Facebook (ça se passe d’ailleurs sur l’interface de gestion des publicités Facebook), même si je me permets d'émettre ici un léger doute quant à la possibilité d'utiliser ce levier pour une marque de vin...car la publicité deviendrait alors "fort intrusive" à mon sens...je ne sais pas, je teste, et je vous dis ça. 

Certaines grandes marques de champagne ont investi le réseau social mondial de partage de photos depuis longtemps.

C'est le cas de Veuve Clicquot par exemple (172.000 abonnés)...  

... ou de Dom Pérignon (131.000 abonnés) : 

...de Moët et Chandon également (109.000 abonnés) :

... ou encore depuis peu de Ruinart (4.288 abonnés) :

Côté vin, on trouve moins de têtes de liste mais on commence à trouver certaines marques et domaines viticoles dans le bordelais, en Bourgogne et ailleurs...D'ailleurs si vous avez de belles trouvailles en la matière, n’hésitez pas à commenter ce post, je complèterai alors l’article avec plaisir !

Sur ce, je vous souhaite une bonne dégustation* et communication à tous !

(* Avec modération bien sûr !)